Dans l’article précédent, j’ai pris le temps de détailler certains cas de figure qui justifient l’emploi de rubber jig pour pêcher la truite. J’y explique qu’une forte pression de pêche peut amener les truites a abandonner les postes les plus marqués et les plus pêchés au profit de cachettes discrètes leur permettant de se reposer tranquillement, loin des leurres et autres dangers, tout en restant à l’affut d’une proie potentielle. Je vais maintenant vous exposer mon approche personnelle pour réussir à leurrer ces vieux poissons difficilement accessibles.

Les milieux où utiliser un rubber jig
Tout d’abord, je tiens à préciser que je pratique principalement cette technique en ruisseaux encombrés ce qui justifie d’autant plus l’utilisation de rubber jig. En général, sur de petits ruisseaux où la moyenne des captures se situe entre 25 et 30 cm, l’approche dont nous allons parler me permet de toucher des poissons de 40 à 50 cm, parfois un peu plus, ce qui est très joli pour la taille de ce type de cours d’eau. Je précise tout de même que cette approche fonctionne aussi très bien sur de plus grands milieux lorsque le spot s’y prête, en témoigne cette énorme truite rouge que vous avez pu voir en couverture d’article.

Le rubber jig, un avantage face à la végétation
Au départ j’ai pensé à utiliser un petit rubber jig à la truite pour des raisons évidentes. Ce petit leurre muni d’une brosse anti-herbe habituellement utilisé sur les bass ou les perches est conçu pour pouvoir pêcher au contact de la végétation et des bois morts sans s’accrocher à chaque lancer. Il était donc parfait pour prospecter les milieux encombrés que je pêchais à la truite. Un mauvais lancer est vite arrivé, et si votre leurre atterrit dans un tas de ronces mieux vaut avoir un hameçon protégé par une brosse (ou un montage texan fait aussi l’affaire dans ce cas précis mais nous en reparlerons plus tard). Moins on perd de temps à se décrocher, plus on pêche, et plus on arrive à être discret, ce qui est souvent un facteur important à la truite.

L’élément déclencheur
C’est d’ailleurs un lancer raté qui m’a permis de découvrir tout le potentiel de ce leurre sur les truites et de pousser l’approche encore plus loin. A l’occasion d’une sortie en ruisseau, j’avais déjà bien décortiqué le spot idéal qui se trouvait devant moi, sans résultat. C’est souvent le cas lorsque la pression de pêche déloge les poissons et les pousse à changer de poste.
Une petite racine devant une berge creuse toute proche attire mon attention. J’effectue deux premiers lancers devant sans voir l’ombre d’une truite. Ce n’est qu’au troisième passage que je rate mon lancer de quelques centimètres. Mon leurre passe alors au-dessus d’une branche basse avant de tomber dans l’eau. Il se retrouve à nager en statique à contre-courant juste devant la racine. Au lieu de chercher à sortir mon leurre de l’obstacle, je commence à le dandiner, et au bout de plus 10 secondes, une tête massive sort de sous la berge et gobe mon jig ! Cette action m’a permis de comprendre comment il était possible d’aller chercher ces poissons méfiants, cachés sous les berges, qui ne sortaient pas sur un simple passage de leurre car trop rapide.

Se servir des obstacles
Depuis ce jour, lancer volontairement mon leurre dans les obstacles pour le coincer dans une racine ou derrière une branche est devenue une approche à part entière pour moi. Au lieu de me méfier de la végétation par peur de m’accrocher comme beaucoup de pêcheurs, je l’utilise pour maintenir mon leurre de longues secondes devant la cache où je soupçonne la présence d’une truite.
Loin d’être un coup de chance, cette approche atypique à la truite m’a rapporté beaucoup de poissons et généralement de biens plus gros sujets que la moyenne du cours d’eau. C’est en quelques sortes une alternative aux techniques des anciens qui utilisent de très longue cannes pour déposer leur vairon juste sous le scion et insister sur une petite zone. D’ailleurs vous pouvez tout à fait pêcher ainsi en verticale sous la canne mais il n’est pas toujours possible d’accéder à toutes les caches de cette manière.

Pourquoi le rubber jig ?
Les avantages d’un petit rubber jig sont les suivants : la petite brosse, que je vous conseille parfois de recouper en partie, permet de sortir très souvent des obstacles sans s’accrocher. La jupe créée un élément vibratoire en plus, et rend le leurre encore plus vivant, mais surtout, elle freine le leurre à la descente et cet effet planant est redoutable.
Le rubber jig sélectionne plutôt bien la taille des poissons car les truites de moins de 25 cm auront souvent du mal à l’engamer et ne se piqueront pas. Rien de plus frustrant que d’abîmer une truitelle avec un leurre qui ne lui était pas destiné.
Dernier point, sélectionnez bien votre canne. Une canne trop légère ou trop souple ne permettra pas toujours de bien piquer le poisson au ferrage avec ce type de leurre. Oubliez votre canne ultra light et optez plutôt pour une canne de puissance de 5 à 15 g pas trop molle.

Une alternative possible
Une bonne alternative est le Fiiish Black Minnow. Sa souplesse lui confère un meilleur taux de réussite qu’un autre shad en texan. Il m’arrive donc de l’utiliser en tailles 70 ou 90 pour concrétiser un poisson qui ne se serait pas piqué sur le jig. Mais sur un milieu où je cible des truites de plus de 40 cm, je commence rarement avec ce leurre car il ne sélectionnera pas vraiment la taille des prises et sa souplesse va de paire avec sa fragilité. Je n’ai pas envie de déchirer un leurre à chaque petite truite qui s’en saisit.

Voir la rivière d’un autre œil
J’espère que cet article vous donnera l’occasion de redécouvrir des rivières que vous connaissez. Il est vrai que cette approche demande de la précision et de la patience car quand on dandine un leurre pendant 10 secondes devant chaque racine on ne couvre pas des kilomètres de rivière. Mais le jeu en vaut la chandelle et vous risquez, comme moi, d’être surpris par la taille de certains poissons qui se cachent encore sous les berges creuses de vos cours d’eau.