Dans cette interview exclusive, Pierre nous livre ses impressions sur ce grand lac irlandais, partage ses techniques, ses leurres préférés, et nous donne ses meilleurs conseils pour réussir une pêche au brochet made in Ireland. Un condensé d’astuces, d’émotions, et de matos bien choisi — évidemment dispo sur Des Poissons Si Grands.
Salut Pierre, merci tout d’abord pour le temps que tu nous accordes. Bien que tu sois une véritable star de la pêche du brochet au leurre, peux-tu te présenter rapidement aux personnes qui ne te connaîtraient pas déjà ?
Et bien je m’appelle Pierre Monjarret, je suis originaire de Saint Nazaire, j’aurai 39 ans en juillet prochain. Concernant mon parcours professionnel, j’ai fait une formation aquacole en Charente-Maritime, à Royan. A cette époque je pêchais le brochet mais surtout la carpe et le silure mais aussi beaucoup le bar sur la côte. J’ai ensuite suivi une formation de Moniteur Guide de pêche en 2006 à Caulnes, en Bretagne. A l’issue de cette formation, je suis directement parti en Irlande où j’ai commencé à guider.
Tes débuts en tant que Guide en Irlande, c’était déjà sur le Lough Derg ?
Pas tout à fait. Lorsque je suis arrivé, j’ai commencé par guider sur de plus petits lacs puis je suis allé sur le Derg de temps en temps. Les premiers résultats sur ce grand lac n’étaient pas fameux car à l’époque on ne connaissait pas encore les types de pêche qu’il fallait pratiquer sur ce genre de grands milieux, les pêches de cassures, de plateaux, les pêches de pleine eau… J’étais habitué aux pêches de bordures sur les petits lacs. Et puis j’ai appris à connaître le lac et les résultats se sont améliorés. J’ai donc commencé à guider des clients dessus. Les choses se sont faites progressivement jusqu’à me spécialiser dans le guidage sur ce lac en particulier.

Tu es un habitué des eaux irlandaises : qu’est-ce qui rend le Lough Derg si spécial pour la pêche au brochet ?
Ce qui rend le Lough Derg spécial est avant tout sa population de brochets importante qui est la conséquence de plusieurs paramètres. Déjà, il y a de très nombreuses zones de reproduction. Aussi, le fleuve Shannon se jette dans le lac ce qui permet de garder un niveau d’eau régulier idéal pour la reproduction. Enfin, les poissons ne sont pas prélevés*.
Ensuite, la proportion de beaux brochets est vraiment intéressante car la nourriture est abondante (brèmes, gardons, tanches, truites) et que les brochets se nourrissent toute l’année (contrairement à la Suède, par exemple). Par conséquent, les poissons grossissent vite. En plus de ça, ils ont vraiment une morphologie exceptionnelle. On vit très régulièrement des sessions incroyables sur le Derg et c’est d’ailleurs pour moi le lac le plus intéressant à pêcher dans cette partie de l’Irlande.
C’est un très beau terrain de jeu, où il y a beaucoup de plateaux, de cassures, de baies, etc. On peut y pratiquer toutes les techniques de pêche pour le brochet suivant les périodes.
(*la réglementation autorise le prélèvement d’1 poisson de moins de 3 kg par jour et par pêcheur mais les irlandais ne prélèvent pas, ndlr)

Peux-tu nous parler des conditions de pêche que vous avez rencontrées durant ce séjour ? Météo, niveau de l’eau, comportement des brochets ?
Au cours de la semaine qui a précédé le séjour, les conditions n’étaient pas hyper favorables, il faisait froid et la pêche était très localisée en pleine eau. Et puis, juste avant l’arrivée de l’équipe du Fishing Club une hausse très importante des températures était prévue. Après la fraie, c’est ce qu’on attend toujours avec impatience car d’un coup les poissons remontent sur les plateaux et c’est le feu ! Et c’est précisément ce qui s’est passé.
Le premier jour je ne savais pas encore trop à quoi m’attendre. On a commencé par des pêches en pleine eau dans 7-8 mètres d’eau avec déjà de très bons résultats et puis ensuite les températures ont continué de monter et là c’était carton, quoi ! (rires)

Quel a été le/les patterns gagnants durant ce séjour ? Plutôt pêche rapide ou prospection lente ? Pêche profonde ? De plateaux ?
Il y en a eu principalement deux. Une pêche très rapide au Guppie en le jerkant de manière agressive. Ça a très bien fonctionné, autant en pleine eau comme sur les plateaux. La première journée on pêchait 2 mètres sous la surface dans 8 mètres d’eau et les brochets montaient plein fer sur les leurres. Cette approche était aussi très efficace dans les grosses boules de fourrage sur les plateaux.
Le second pattern ça a été le DRT Klash 9 en mode glidebait (après avoir enlever la bavette et inversé le sens de la queue) sur les plateaux. Ce leurre a très très bien marché et fait une vraie différence.


Côté matériel, sur quoi t’es-tu appuyé ? As-tu des combos fétiches canne + moulinet pour ce type de pêche ?
Pour moi, il n’y a pas besoin d’avoir beaucoup de cannes. Une canne casting courte de 2m-2,10m associée à un moulinet en taille 300 pour le Jerk et une plus longue de 2,50 à 2,70m associée à un moulinet en taille 400 pour tout le reste, gros swim, gros shad, Miuras, etc.
On considère les cannes jusqu’à 80g de puissance comme des cannes finesse ici ! (rires) Il n’y a pas besoin de pêcher très fin sur le Derg. Nous c’est : pas de pointe de discrétion en fluorocarbone, un bas de ligne en 100-110°°, un anneau soudé associé à un anneau brisé à la place d’une agrafe. Voilà le schéma.
A titre perso, j’utilise les cannes BFT Lizzard X. La Lizzard X Medium Power, qui est la canne signature de « Trumman » (Stefan Trumstedt avec qui Pierre forme un binôme iconique en compétition depuis des années ndlr) couplée à un moulinet Shimano Tranx 301 et la Lizzard Heavy Power, qui est ma canne signature, couplée à un Tranx 401.

Tu as utilisé plusieurs types de leurres pendant le séjour. Peux-tu nous dire lesquels ont été les plus efficaces, et dans quelles conditions ?
Comme je te disais, durant le séjour c’était Guppie et Klash 9. Je n’ai pas beaucoup sorti le Guppie Jr sur la semaine mais je l’utilise énormément en temps normal. Pour moi, le Guppie dans sa grande taille, c’est LE leurre incontournable sur le Derg car tu peux pêcher toutes les couches d’eau et tous les spots avec. Tu peux pêcher creux en lui ajoutant un petit lest en tungstène mais également très shallow. Tu peux donc pêcher avec toute l’année, rapidement au-dessus des herbiers l’été, très lentement au niveau des cassures l’hiver… Et puis il a une nage de fou avec la queue type curly qui rend les brochets dingues. (rires)

Le Guppie est silencieux donc j’imagine qu’il y a néanmoins des journées « billes », non ?
Oui, carrément, ils sont très complémentaires avec le Buster Jerk. En gros, on a 6 références de leurres avec lesquels on pêche toute l’année : les Buster Swim et Buster Jerk, les Guppie et Guppie Jr, le Spro BBZ 8 et la Miuras Mouse que j’utilise maintenant principalement avec un shad en trailer, les brochets commencent à se méfier des doubles queues. (rires)
En parlant de la Miuras, tu l’utilises sur des spots précis ?
Non, je l’utilise partout. Le linéaire rapide au-dessus des herbiers est très efficace. Ensuite, en la plombant en 15, 20 ou 30g, je pêche les cassures en linéaire plus lent. A l’image du Guppie, je l’utilise toute l’année. C’est pour ça que tu n’as pas besoin d’avoir 50 000 leurres pour pêcher le Derg. C’est bien d’avoir 2-3 coloris différents par leurre, mais c’est tout.

Quels conseils donnerais-tu à un pêcheur français qui rêve de partir en Irlande pour traquer le brochet ?
A l’image de ce que j’ai dit plus haut, c’est de ne pas se surcharger en matériel, de se limiter à quelques valeurs sûres sur les secteurs où on compte pêcher ce qui suppose de prendre des renseignements auprès de son guide sur les références de leurres du moment.
Il faut impérativement avoir le matériel adapté. Je vois trop de pêcheurs qui arrivent avec des cannes, des tresses et des agrafes beaucoup trop fines. Il faut que le matos soit costaud.
Quel est ton meilleur souvenir de ce trip avec le Fishing Club ? Une touche de malade, une anecdote sympa ?
Il y en a eu plein mais le premier gros poisson au Klash 9 (le premier 116 ndlr) a eu une saveur particulière. Il y a eu beaucoup d’excitation autour de cette capture, David était un peu stressé durant le combat. (rires) Il me répétait « c’est un gros, c’est un gros ! » mais je ne le voyais pas moi, je ne distinguais que leurre qui faisait de grands travers. Je change alors d’angle de vue et j’aperçois cette poutre, c’était génial. La capture d’un gros poisson c’est de toute façon toujours un bon souvenir.

Après il y a d’autres souvenirs cools, des attaques en surface sur les blancs, un brochet de 90 cm qui s’est fait attaquer par un autre durant un combat. Les pêches dans peu d’eau au swim ont ça d’exceptionnel, c’est que ce sont des pêches visuelles.
Ah si, il y a eu ce moment assez fou dans une baie où on a pu voir un poisson de 110 calé au milieu des brèmes puis passer doucement devant le bateau. T’as les jambes qui tremblent, t’as envie de lancer partout pour essayer de le faire. (rires)

Quel est ton pire souvenir de pêche de manière générale ?
Je dirais la perte d’un gros poisson au bateau en compétition sur un lac en Suède. Et il y en a eu un autre, toujours sur ce lac, un poisson d’environ 1,20 m. On a essayé de le mettre à l’épuisette 3 fois mais il était vraiment très puissant et il a fini par se décrocher au bateau, pareil. D’habitude, perdre des poissons ça ne me dérange pas, c’est surtout en contexte de compétition que ça devient réellement un mauvais souvenir? C’est frustrant car c’est le genre de poisson qui te fait grimper rapidement au classement. Mais autrement, je n’ai pas de mauvais souvenir à la pêche.
J’ai quand même en mémoire un hold up mémorable sur une édition de Fly Vs Jerk avec ce poisson de 127 cm !
Ah ah ah ! C’était magique ça !
Et pour finir, si tu ne devais emporter qu’un seul leurre pour retourner au Lough Derg, ce serait lequel ? Et pourquoi ?
Un Guppie, 100% ! Même si le Klash 9 en mode Glidebait a fait une différence indéniable sur la semaine, comme énormément de leurres, il ne sera pas aussi polyvalent que le Guppie sur toute la durée de la saison.

Et sinon, que fais-tu lorsque tu ne guides pas ?
Je pêche ! Je passe du temps en famille, je m’occupe de mon fils. Je fais un peu de sport aussi, de la randonnée. Mais globalement, tout tourne autour de la pêche. (rires)
Un grand merci à toi Pierre pour ce partage aussi inspirant que technique !
Le Lough Derg a tenu toutes ses promesses, et ce séjour a une nouvelle fois prouvé qu’un bon guide, une lecture fine des conditions, et un matériel bien adapté font toute la différence. Si vous aussi vous rêvez d’un séjour pêche au brochet en Irlande sur le Lough Derg, vous savez maintenant à qui vous adresser… et avec quoi remplir vos boîtes de leurres !
👉 Retrouvez tout le matériel utilisé par Pierre et David dans notre sélection spéciale “Lough Derg” au bas de cet article.
Et pour prolonger l’aventure, ne manquez pas la vidéo complète du séjour sur la chaîne YouTube du Fishing Club, à retrouver juste ici ⤵️