Beaucoup ont tenté de percer le mystère, de trouver la recette magique pour réussir à capturer plusieurs grands brochets. Sans succès… Malheureusement la recette magique n’existe pas, si ce n’est qu’il faille avant tout pêcher régulièrement des biotopes qui produisent des grands brochets en bonne santé, s’armer de tout son mental de passionné et passer du temps, beaucoup de temps, à essayer de comprendre qu’elle sera la clé pour tout déverrouiller. Si vous pêchez régulièrement dans le domaine public, il y a de fortes chances que votre leurre ait déjà croisé un grand brochet sans que rien ne se soit passé. Je vous propose d’aborder ensemble, une liste des préceptes de bases qui pourront vous aider à mettre toutes les chances de votre côté.
Un alignement des planètes
On pourrait penser que la capture d’un grand brochet se fait aléatoirement, comme ça, un jour comme un autre lors d’une partie de pêche anodine… C’est effectivement possible car la pêche ne s’interdit aucune règle ni aucune exception, mais ce n’est pas parce que l’on a pris un grand brochet par accident sans vraiment saisir le pourquoi du comment, que l’on va facilement récidiver cet exploit.
La pêche des grands brochets répond à des règles fondamentales pleinement définies, il n’y a pas de hasard dans cette pêche. Un poisson de 120cm qui suivra votre leurre à quelques centimètres sans l’attaquer resta toujours comme à des années lumières de monter dans votre bateau.
La météo
La météo a pour moi une importance capitale dans cette pêche des grands poissons. Elle peut soit vous faciliter la tâche, soit la compliquer. Il n’y a rien de plus frustrant que de rater une ouverture en pêchant le brochet. Les poissons n’ont pas vu d’humains depuis des mois et sont pourtant dans une torpeur totale. Cela s’explique souvent par les conditions météorologiques et la pression atmosphérique.
Il y a bien entendu toujours ces exceptions qui chamboulent les règles, ce grand brochet pris en pleine canicule avec un soleil au zénith, mais on peut tout de même dégager des configurations météorologiques plus fiables que d’autres.
Un temps changeant
La condition météo que je déteste le plus est un temps installé depuis plusieurs jours. Cela peut être un anticyclone ou un ciel bas et pluvieux.
La meilleure fenêtre météo est, selon moi, quand le temps change. Le temps peut changer après 10 jours de soleil comme changer 4 fois au cours de la journée, il n’y a pas vraiment de règle. J’ai passé assez de temps sur l’eau pour avoir pu observer plusieurs fois toute une armée de brochets se mettre en chasse alors que tout ce beau monde dormait quelques minutes plus tôt.
Les grands brochets collent assez bien à cette règle, ils dominent les eaux et n’ont peur de rien ni personne. Quelques minutes par semaine sont suffisantes pour eux afin de se nourrir. Certains sujets se nourrissent davantage de nuit grâce à leur ligne latérale, d’autres de jour. La fenêtre d’activité des poissons est minimaliste et il ne faut pas occulter que ce sont des poissons fainéants avant tout.
Le vent
Ce facteur est souvent considéré comme un ennemi par bon nombre de pêcheurs mais les pêcheurs de brochet expérimentés savent qu’il est un allié précieux.
Le vent brouille tout, aussi bien pour les poissons que pour les pêcheurs, en ridant la surface de l’eau. Il crée une agitation sous l’eau qui remue toute la micro faune et par association logique, toute la chaine alimentaire qui en découle. Cette agitation permet également à nos leurres de ne plus émettre les stimuli aux fréquences robotisées que nous leurs avons conférées. La brise rend votre leurre plus « vivant » et « naturel » pour un brochet.
Le vent est également un allié précieux pour réaliser ses dérives en s’aidant de sa poussée. Cela permet d’effectuer des dérives silencieuses en toute discrétion sur les poissons et ce, sans utiliser d’électronique à bord.
La lune
La lune joue également un rôle fondamental dans la recherche des grands brochets, je ne compte plus les sessions pleines d’échecs quand je ne prêtais pas assez attention aux effets de la lune. On sait que la lune a une influence magnétique conséquente sur les grandes masses d’eau et il est indéniable que cela joue également sur l’humeur des poissons.
Il semblerait que les brochets aiment les contrastes et se mettent en activité davantage quand la lumière leur permet de dissocier les formes au-dessus d’eux. C’est en partie pourquoi il est plus rare de capturer des brochets au crépuscule ou aux aurores.
Cette recherche du contraste fonctionne également pour la nuit, les brochets sont peu actifs les jours de nouvelles lunes.
A l’opposée, il est très délicat de capturer des brochets les jours de pleine lune et ceux adjacents à celui ci. Comme si l’activité nocturne était alors à son paroxysme.
Les meilleurs jours pour capturer un grand brochet en journée sont donc les jours qui précèdent (j-5 à j-3) et succèdent (j+3 à j+5) la pleine lune, là où le contraste offert par la lune est tel pour maintenir les poissons en activité en journée.
Les bons spots
Il est impossible ici de définir un poste spécifique à grands brochets, chaque destination a sa propre configuration et ses propres particularités.
Toutefois, il est plus facile de dégager un schéma à grands poissons en lac où les poissons se placent beaucoup plus par hiérarchie sur les meilleurs postes de chasse qu’en rivière où la territorialité est beaucoup plus instable.
Il faut alors faire des analyses et des statistiques sur les prises des grands poissons sur les lieux que vous pêchez. En recoupant des informations à plusieurs pêcheurs on arrive à résoudre un début de l’équation. Un grand brochet n’est jamais là par hasard.
Quand vous avez déterminé des zones où les brochets chassent de temps à autres, et qui sont des zones abordables aux leurres, alors vous avez fait une grande partie du chemin.
Les bonnes heures
Il n’y a pas vraiment de tranche horaire qui se dégage nettement dans la capture des grands brochets. Cela dépend de nombreux facteurs à commencer par la saison et les conditions du jour. Toutefois, l’activité des grands brochets semblent fonctionner par période. Si l’on a réussi à capturer un grand poisson à 7h00 du matin au mois de juin ou à 16h au mois d’octobre par exemple, il y a de fortes chances que cette fenêtre d’activité reste viable les jours qui suivent votre capture initiale.
Les bons leurres…
Le nombre de « specimen hunters » a logiquement explosé avec la découverte de la présence de ces grands poissons en nombre et les approches se sont perfectionnées au fil des saisons.
Des leurres sont ressortis clairement du lot pour faire déplacer et craquer ces grands poissons au régime alimentaire très diversifié. On peut mentionner la Murias Mouse de CWC, le toujours productif Sandra de Delalande (et plus largement les Grubs tels que le Dexter Eel 210 Illex par exemple) ou encore les swimbaits multi-segments comme la S’Trout 230 ou le Swimpike 20 cm de Biwaa… Bien entendu, on ne compte pas le nombre de gros brochets capturés sur des gros soft swimbaits (3D Trout, Dunkle 9, etc) et particulièrement les shads (Wolfcreek Shad, Dexter Shad, etc).
…au bon moment
Ces leurres ont tous leurs caractéristiques particulières et doivent être utilisés à bon escient.
Si l’on va éviter d’utiliser un gros shad qui brasse beaucoup d’eau par temps calme où on lui préfèrera un grub par exemple, il sera judicieux de l’utiliser par fort vent.
Il faut jouer avec les conditions du moment et les vibrations du leurre. A titre d’exemple, j’ai souvent sorti mon épingle du jeu avec des leurres segmentés par temps calme.
Les bonnes couleurs
Inutile de se compliquer la tâche en ce qui concerne les coloris qui pourront faire la différence sur ces grands poissons, il faut penser binaire : les coloris flashy et les coloris naturels.
Ce n’est plus une exclusivité, les grands brochets réagissent bien aux UV, les coloris flashy ont cette tendance à pouvoir déclencher des attaques que les autres coloris ne déclencheraient pas et ce, quelles que soit les conditions. Le Fire Tiger est LE coloris phare pour prendre un grand brochet, c’est une bombe d’UV avec un mélange de vert, jaune et orange et offrant un contraste fort. Ce coloris a pris des brochets de plus de 130cm par eau claire, eau piquée, temps ensoleillé, temps très sombre… C’est de très loin le coloris valeur sûre pour de nombreux traqueurs de brochets géants.
A titre d’exemple, le coloris Odorya Chart du Balam de Madness est le plus vendu en France. Ce n’est certainement pas un hasard.
Concernant les coloris naturels, si j’aime avoir des leurres qui émettent des reflets et flashs quand l’eau est claire et la luminosité suffisante, j’utilise de plus en plus des coloris naturels très sombres. Je ne cherche plus vraiment à obtenir un certain mimétisme, je veux surtout une forme qui se détache bien dans l’eau afin d’être facilement repérée.
La bonne taille
C’est peut-être l’erreur à ne pas commettre lorsqu’on se focalise sur ces grands poissons : pêcher avec des leurres de la mauvaise taille.
Les grands brochets peuvent se nourrir d’un gardon de plusieurs kilogrammes mais ce n’est pas pour autant qu’ils le font régulièrement. Les grands brochets affectionnent également se nourrir de petites proies, sans doute par confort et facilité de digestion.
Il ne faut donc pas tomber dans le travers d’utiliser uniquement des leurres démesurés de 30cm espérant faire bouger uniquement le brochet géant des lieux, cette règle basique n’est pas viable dans le temps. Au contraire, l’utilisation de très gros leurres fera déplacer davantage des mâles au comportement territorial. Le nombre de brochets modestes pris sur le Gira Gira Kougeki de Deps qui fait pourtant 33cm est un exemple de plus qui va dans le sens de cette constatation.
Si utiliser des leurres autour de 20/25cm aide à faire le tri, 18/20cm permettent de capturer des brochets de toutes tailles. Il faut garder en tête que la prise de grands brochets sur des leurres de 10 à 15cm reste fréquente, les grands brochets, bien que lunatiques, restent avant tout fainéants et opportunistes.
Le bon tempo
J’ai longtemps pensé avec une conviction forte que les brochets affectionnaient avant tout une proie mourante qui n’avance pas, encore plus quand le poisson recherché pèse plus de 10kg et ne se déplace plus aussi facilement qu’avant. Dans mon idéal, la meilleure proie était à l’image d’un gardon de belle taille fixé sur une monture mort maniée qui plane devant son nez. J’avais tort.
Les grands brochets sont des poissons d’expérience qui ont déjoué x pièges au cours de leur vie. Dans certaines configurations où les poissons sont postés par faible profondeur, ramener son leurre le plus vite possible a la faculté de déclencher une attaque foudroyante et réflexe. Le leurre est alors souvent largement engamé, le poisson n’a pas le temps de cogiter.
A contrario, dans une configuration où les poissons sont posés sur le substrat par plusieurs mètres de profondeur, des animations en dent de scie peuvent davantage provoquer des attaques que le linéaire ne déclencherait pas, donnant une trop bonne dynamique de vie à votre leurre. Les nombreuses prises de poissons record sur le lac Léman avec gros tubes animés lentement l’attestent. Quand les brochets calculent, il faut s’adapter à eux.
Les certitudes de notre expérience
Je n’aurais pas pu écrire cet article 10 ans auparavant. Mais notre connaissance communautaire sur ces grands poissons a largement progressé depuis et il ne s’est jamais autant pris de grands poissons régulièrement. Nous avons aujourd’hui de réelles certitudes dans la quête des grands brochets et cela nous permet de renforcer davantage encore nos convictions, même quand la pêche est difficile.
